Calculer avec la lumière

Des partenariats entre entreprises privées et universités contribueront à la réalisation au Canada d’ordinateurs quantiques commercialement viables

Lorsque l’on rédigera des manuels de construction d’ordinateurs quantiques, une étape cruciale, du moins pour une certaine catégorie d’ordinateurs quantiques, portera sur l’envoi de photons (particules de lumière) dans les circuits d’une puce informatique.

C’est ce que fait Applied Nanotools, une entreprise d’Edmonton, à l’aide de l’équipement et des installations avancées de nanofabrication de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). Celle-ci fait partie du Colaboratoire quantique (Colab quantique), milieu de recherche-développement qui vise à donner vie à la technologie quantique.

« Nous considérons que la collaboration est très importante », déclare Mirwais Aktary, chef de la direction d’Applied Nanotools. « Je suis certain que d’autres entreprises canadiennes de technologie partagent ce point de vue. » [traduction]

Le Colab quantique regroupe les installations et les chercheurs de l’Institut Stewart-Blusson sur la matière quantique de l’UBC, de l’Institut quantique de l’Université de Sherbrooke, ainsi que de l’initiative Technologies quantiques transformatrices (TQT) de l’Institut d’informatique quantique de l’Université de Waterloo.

Applied Nanotools offre des services de fabrication photonique sur silicium — fabrication de puces dont les circuits transportent de la lumière — à des entreprises et à des chercheurs du monde entier, qui utilisent ses services pour diverses applications.

Bien que le secteur des télécommunications et d’autres entreprises de stockage de données et de traitement du signal utilisent des puces photoniques, l’informatique quantique constitue la principale application émergente de ces puces, selon M. Aktary.

« Beaucoup de travaux récents portent sur l’informatique quantique, où l’on tente de construire des ordinateurs quantiques en faisant appel à la photonique sur silicium. » [traduction]

Un nombre croissant d’entreprises en démarrage et de chercheurs universitaires s’efforcent d’inaugurer une ère technologique entièrement nouvelle en mettant au point des ordinateurs quantiques qui permettraient de résoudre des problèmes majeurs et de réaliser des simulations complexes hors de portée des ordinateurs même les plus puissants disponibles actuellement.

Le plus simple serait de construire des ordinateurs quantiques sur puces de silicium, puisque celles-ci sont faciles à fabriquer. Par contre, l’implantation sur ces puces de circuits capables de transporter des photons pose des difficultés.

Applied Nanotools fait des investissements considérables en recherche-développement pour relever ces défis.

Pour cela, elle travaille en collaboration avec divers laboratoires universitaires qui possèdent les installations, l’équipement et l’expertise nécessaires.

Dans le cadre d’un projet, Applied Nanotools adopte une nouvelle méthode, dite de microcâblage photonique, en collaboration avec une équipe dirigée par Lukas Chrostowski, professeur de génie électrique et informatique à l’UBC.

« Essentiellement, nous câblons une fibre optique directement sur la puce » [traduction], dit M. Aktary.

Les installations avancées de nanofabrication de l’UBC possèdent un outil de microcâblage photonique capable d’effectuer cette opération, de même qu’un outil de lithographie par faisceau d’électrons qui permet de graver de minuscules éléments, d’une taille de quelques nanomètres, sur les plaques de silicium.

M. Aktary dit que son entreprise ne pourrait pas faire de photonique sur silicium sans accès à cet équipement avancé.

Mais il ajoute que de telles collaborations profitent aussi à ses partenaires universitaires. Les universités récupèrent une partie de leurs coûts en louant leur équipement, et les chercheurs bénéficient des connaissances résultant de la commercialisation de ces technologies.

Au bout du compte, selon M. Aktary, la collaboration accélère le passage du laboratoire à la commercialisation, pour le bénéfice de tout le pays.

« Le Canada fait beaucoup de recherche fondamentale, dit-il, mais nous voulons que cela ait des répercussions dans l’industrie. Il s’agit de mettre au point des processus fondamentaux qui puissent être commercialisés. » [traduction]

M. Aktary poursuit en disant que même si ce sont d’autres entreprises qui vont construire des ordinateurs quantiques, c’est passionnant de fabriquer les puces pour leur compte et d’être un partenaire à la base de ces développements.

« Nous allons faire le travail de prototypage pour certaines des premières applications, dit-il. Nous allons voir si l’on passe ensuite à la production de masse. Pour que cela se fasse au Canada, nous devons beaucoup investir dans la fabrication et l’infrastructure. » [traduction]

Selon M. Aktary, tout indique qu’il y a des progrès rapides vers la réalisation d’ordinateurs quantiques utiles et extensibles qui pourront être commercialisés.

« Les scientifiques sont sur la voie de la fabrication d’un ordinateur quantique commercialement viable, dit-il. Ils ont une feuille de route, et je crois qu’ils ont une bonne chance d’y parvenir. » [traduction]